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PANORAMA DES PROBLÈMES SOCIAUX DANS LES MÉTIERS DE SERVICES À LA PERSONNE

Taux de turn-over

Turn over

Les mauvaises conditions de travail (rémunération, horaires, pénibilité, temps de travail) expliquent à 89 % le fort taux de turn-over dans les métiers d’aide à domicile qui peut grandement compliquer la gestion du personnel et nuire à la qualité de service attendue par les personnes aidées, autrement dit, les clients.

Travail partiel subi

Temps partiel subi

Selon François-Xavier Devetter et Emmanuelle Puissant (2010), la création du marché des services à la personne relève d’une stratégie publique de légitimation des bas salaires dans l’ensemble des activités qui en relèvent : ils sont compris entre 600€ et 900€ nets par mois,  qui placent près d’un salarié sur cinq en situation de pauvreté monétaire. Ce n’est pas tant le taux horaire qui pose le problème de rémunération que le nombre d’heures prestées. D’après les résultats de l’enquête de la DARES sur les métiers des SAP en 2018, un.e intervenant.e travaillant pour un organisme public effectue 22,6 heures par semaine contre 18,1 heures dans une association de services à la personne et 15,6 heures dans le privé, ce que nous pouvons qualifier de travail partiel subi.

Non seulement ce temps de travail partiel subi limite les rémunérations et maintient les salarié.e.s dans une logique de travail d’appoint; mais en prime, le temps de travail considéré comme effectif et payé ne reflète pas suffisamment le temps de travail réel des salarié.e.s! Les conventions collectives des métiers de SAP ne comptent pas les temps de trajet et les temps informels d’échange avec les différentes parties prenantes de l’entreprise (collègues, direction, clients, leur famille…). C’est ce décalage entre le temps de travail payé et le temps de travail réel qui fait dire à Emmanuelle Puissant, que « ce n’est pas le temps partiel qui est répandu, mais les temps pleins qui ne sont pas reconnus dans le secteur »

 

Problématique de mobilité

Mobilité

Si le morcellement du travail montre un réel décalage entre le temps de travail rémunéré et l’amplitude des journées de travail, le multi-salariat ou le multi-clients au sein d’une même journée introduit en sus, des difficultés de mobilité entre les différents lieux d’intervention et la gestion des plannings des salariés. Cette mobilité est un réel facteur de pénibilité et d’augmentation des risques professionnels dans la mesure où le risque d’accidents de la route notamment est multiplié, de même que, plus globalement, celui de dégradation de l’état de santé des salarié.e.s.

Taux élevé d'accidents de travail et maladies professionnelles

Accident de travail

La pénibilité physique et des risques psychosociaux liés aux métiers présentent un taux élevé d’accidents du travail en 2016 (9,6%) : un taux deux fois plus élevé que la moyenne générale observée dans l’ensemble des professions. Le taux d’accident y est donc supérieur à celui du secteur de la construction par exemple. 

 

L’aide à domicile figure ainsi parmi les secteurs fortement exposés aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, avec plus de 47 jours d’arrêts pour un million d’heures travaillées contre 33 en moyenne pour l’ensemble des salariés (CNAMTS, 2016).

Absence de formation

Formation

En outre, le faible niveau de formation dans ce secteur reflète bien cette non reconnaissance sociale : 48% des salariés des métiers des services à la personne ne sont pas formés (près d’un salarié sur trois sans diplôme, moins d’un sur six titulaire d’un diplôme supérieur ou égal au bac) alors que ces emplois ne peuvent être occupés qu’à condition de posséder un socle minimum de compétences y compris digitales et de satisfaire un certain nombre d’exigences attendues par les employeurs et des clients qui tiennent notamment aux qualités relationnelles de l’intervenant.e et à ses capacités d’ajustement aux attentes des particuliers.

Absence de reconnaissance sociale et valorisation des métiers

Reconnaissance sociale

Aux conditions de travail difficiles, s’ajoute une absence de reconnaissance sociale. Le profil des travailleurs dans les services aux ménages est majoritairement constitué de femmes, de personnes peu qualifiées, avec une forte proportion de salariés de plus de 45 ans et de travailleurs immigrés qui font également émerger la problématique de l’illettrisme et de l’alphabétisation. L’absence de reconnaissance de l’existence même de compétences mobilisées ou de pénibilités subies dans les métiers de services à la personne (notamment celui des aides ménager.e.s)  est donc un facteur de dévalorisation de ces métiers. François-Xavier Devetter et Emmanuelle Puissant (2010) parlent même de « déqualification » :  “nous entendons ici un double processus de sous-estimation et de non-reconnaissance des compétences mises en œuvre d’une part, et de suppression des compétences mobilisées par le développement d’outils ou de formes d’organisation du travail réduisant l’autonomie des professionnelles d’autre part.”

 

En toile de fond, ces métiers sont identifiés comme proches de la sphère domestique et comme étant des métiers d’appoint très peu techniques. Les compétences qui y sont déployées sont vues comme un prolongement des compétences naturelles. Aussi, à quoi bon former et reconnaître des métiers qui sont plus ou moins une délégation des tâches normalement assumées par chacun.e chez soi ou pouvant l’être à priori?